Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont adopté des règlements (Règlement 31-103 sur les obligations et dispenses d’inscription et les obligations continues des personnes inscrites et Instruction générale relative au Règlement 31-103) par rapport aux « réformes axées sur le client » en se basant sur le principe que dans la relation entre le client et le conseiller, les intérêts du client priment. Par exemple, les produits et les services que les conseillers et les gestionnaires de portefeuille recommandent aux clients doivent donc être dans l’intérêt supérieur des clients. Cette recommandation doit être fondée sur une compréhension approfondie, notamment, de chacun des objectifs et des profils de risque (le niveau de tolérance au risque et la capacité au risque) de leurs clients et sur la preuve qu’ils les connaissaient. Depuis leur lancement en 2019, les réformes axées sur le client ont été mises en œuvre le 31 décembre 2021. Les organismes de réglementation effectuent maintenant des audits pour en évaluer l’application par les sociétés ainsi que leurs conseillers et leurs gestionnaires de portefeuilles inscrits.
Comment cela se traduit-il concrètement pour votre société? Qu’est-ce que les organismes de réglementation recherchent lorsqu’ils viennent faire une visite sur place? Où pourriez-vous être exposé à un risque d’infraction?
La conférencière de renom Ellen Bessner a offert une foule de conseils pratiques sur ce sujet au cours d’une webémission organisée par Banque Nationale Réseau Indépendant. La profondeur du point de vue d’Ellen sur les règles des réformes axées sur le client repose sur son expérience aux premières lignes. Avocate plaidante chevronnée en droit commercial, elle a défendu des conseillers, des gestionnaires de portefeuilles et des sociétés contre les allégations d’infractions de conformité par les organismes de réglementation. Elle les a défendus contre leurs clients concernant des allégations de convenance et de négociation discrétionnaire. Elle connaît bien les répercussions des réformes axées sur le client du point de vue des organismes de réglementation et des juges, et elle a écrit deux livres pour aider les conseillers et les gestionnaires de portefeuille à s’acquitter de leurs obligations en matière de conformité.
Cet article portera sur plusieurs concepts clés de sa présentation, et il comprendra aussi des conseils pour vous aider à vous préparer à l’audit.
1. Gardez une trace écrite de grande qualité et en grande quantité
Des réunions en personne aux appels virtuels et téléphoniques, les conseillers discutent avec leurs clients pour apprendre à les connaître et surveiller l’évolution de leur situation, de leurs valeurs et plus encore (voir la section suivante pour en savoir plus sur ce sujet). Si vous ne l’avez pas déjà fait, prenez l’habitude de prendre des notes pendant toutes ces conversations. Autrement, vous vous exposez à des risques.
« La documentation, dans le cadre de la réforme axée sur le client, est la loi, a déclaré Ellen. Vous devez vous assurer d’approfondir et de préparer ce que j’ai toujours appelé des notes contemporaines – des notes prises en même temps que votre client vous dit ce qu’il vous dit. »
En documentant les conversations en temps réel, vous protégez votre réputation, votre gagne-pain et votre permis d’exercice. Par exemple :
- Si vous faites l’objet d’une vérification réglementaire, il ne suffit pas de dire ce que vous avez fait; vous devez le prouver. « Il s’agit d’une infraction en vertu de la réforme axée sur le client si vous n’avez pas de documents à l’appui de chaque élément de vos formulaires de connaissance de son client (CDC) et si vous n’avez pas de notes pour appuyer toutes les mises à jour et les instructions que vous recevez », a déclaré Ellen.
- Si un client a intenté une action en justice contre vous, il ne suffit pas de s’appuyer uniquement sur le témoignage de vive voix; votre cas nécessitera des documents pour appuyer votre position.
Quelle est la meilleure façon de prendre des notes? Idéalement, tapez-les directement dans votre système CRM, si vous en avez un, ou tapez ou écrivez les notes à la main, puis scannez-les. (Bien sûr, vérifiez le manuel de votre courtier et suivez les processus obligatoires.)
Comment saurez-vous si vos notes sont satisfaisantes du point de vue de la réglementation? Suivez les 5C de la prise de notes d’Ellen : vos notes doivent être contemporaines, correctes, complètes, courantes et cohérentes. Pour en savoir plus, lisez son récent article pour Investment Executive : « Pass compliance audits and win credibility with the 5Cs » (en anglais seulement).
Ellen donne un conseil sur le dernier élément : cohérence. Elle a dit que les organismes de réglementation qui effectuent des audits dans le cadre des réformes axées sur le client vont non seulement examiner « […] les notes, mais aussi s’assurer qu’elles appuient les décisions prises à la fois dans le formulaire de CDC et dans le cadre des décisions relatives à la pertinence ». Voici comment vérifier si vos notes sont cohérentes :
Choisissez au hasard cinq clients et lisez vos notes pour chacun. Ensuite, en vous fondant uniquement sur ce que vous avez lu dans les notes, devinez ce qui devrait figurer sur le formulaire de CDC. Si votre supposition et le formulaire correspondent, vous vous en sortez bien.
Un dernier mot sur les excellentes notes : elles sont excellentes pour les relations avec les clients. Vous serez en mesure de voir rapidement le contexte des conversations antérieures et de déterminer ce sur quoi faire un suivi, qu’il s’agisse d’un changement dans leurs placements ou même d’un détail personnel, comme une étape importante franchie dans la famille. « Ces notes vous aideront à vous souvenir des nuances et des détails, a dit Ellen.
2. Soyez curieux
Vous avez la responsabilité d’agir dans l’intérêt supérieur de vos clients. Mieux vous les connaîtrez, plus vos conseils seront éclairés sur les placements appropriés. Alors, soyez curieux!
« Connaître vos clients implique de savoir ce qu’ils font et pourquoi, a-t-elle déclaré. « Vous voulez évaluer professionnellement, par le dialogue avec vos clients, s’il est approprié ou non de modifier leurs facteurs de CDC. »
Bien sûr, tenir à jour vos formulaires de CDC va de soi, mais vous pourriez avoir l’occasion d’établir des relations plus solides avec vos clients en acquérant une meilleure compréhension de leur situation.
Par exemple, supposons qu’une cliente vous avise d’un changement d’adresse. Il y a deux options pour y répondre : 1) envoyez-lui un formulaire pour remplir la nouvelle adresse; 2) communiquez avec elle et ayez une conversation avant de faire les mises à jour appropriées.
La deuxième option présente d’importants avantages, a déclaré Ellen. Par exemple, que se passe-t-il si l’avis n’est pas réel, et qu’en fait, votre cliente est victime de fraude? Cette situation se produit plus souvent, et vous protégerez ainsi votre cliente en confirmant que le changement est légitime.
Si vous confirmez que le changement d’adresse est réel, posez des questions à votre cliente pour en comprendre la raison. Selon son âge, par exemple, elle pourrait éprouver des problèmes de santé et passer à un mode de vie supervisé. À l’inverse, ses expériences au cours de la pandémie l’ont peut-être incitée à déménager dans une propriété plus grosse afin d’avoir plus d’espace. Il y a de nombreuses possibilités, mais le fait est que les raisons du changement pourraient indiquer une évolution des valeurs ou de la situation financière des clients. Il ne s’agit pas d’être indiscret; vous ne le saurez tout simplement pas si vous ne posez pas la question. Et vos clients vous seront reconnaissants de prendre le temps de comprendre le contexte.
« Dans toutes vos communications, avec tous vos clients, vous voulez écouter ce que j’appelle les “nuances”, a déclaré Ellen. Explorez en détail les valeurs réelles du client. »
3. Sachez comment gérer un client qui refuse vos conseils
Idéalement, vos clients vous ont choisi pour une raison : ils font confiance à votre expertise. Cependant, il PEUT y en avoir un ou deux qui souhaitent apporter des changements que vous jugez, selon votre opinion professionnelle, inappropriés pour eux, comme transférer tous leurs titres dans des CPG ou vice versa.
Il y a trois étapes à suivre dans ce type de situation, chacune étant décrite dans l’article 13.3 (2.1) du Règlement 31-103. En résumé, les voici :
1) Expliquez au client votre analyse des raisons pour lesquelles la mesure n’est pas appropriée;
2) Faites part de votre recommandation quant à une autre mesure qui convient;
3) Si le client est catégorique, il ne vous laisse pas le choix. Confirmez par écrit les instructions sur lesquelles vous vous fondez et confirmez par écrit ce que vous avez fait aux points 1 et 2.
Sachez que vous pouvez refuser l’opération et inviter le client à l’effectuer ailleurs.
Pour en savoir plus
Pour le meilleur ou pour le pire, les réformes axées sur le client sont là pour de bon. Il est impératif de vous protéger et de protéger vos clients en respectant les exigences. La bonne nouvelle, c’est que vous pouvez aussi tirer parti des réformes axées sur le client pour renforcer vos relations avec vos clients, comme Ellen l’a illustré dans sa présentation.
Ellen offre d’autres conseils judicieux et pratiques aux gestionnaires de patrimoine. Pour en savoir plus, visitez son site Web, puis sélectionnez « Publications ».
Si vous êtes un client de Banque Nationale Réseau Indépendant et que vous avez des questions au sujet des GRC, communiquez avec votre vice-président régional. Si vous envisagez de devenir indépendant et avez des questions sur la conformité, communiquez avec nous à NBINinformation@nbc.ca.
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